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1920 : The New Jerusalem (3)

 

La-Nouvelle-Jerusalem.png

 

« Ce fut aux approches de Noël que je sortis de mon petit jardin dans ce “champ de hêtres” qui est entre les Chilterns et la Tamise et commençai à remonter le cours de l’histoire jusqu’à l’endroit d’où nous vient Noël. Car il est souvent nécessaire de retourner sur ses pas, comme celui qui s’est trompé de chemin revient au poteau indicateur pour trouver la bonne route. L’homme moderne est un voyageur qui a oublié le nom de sa destination et doit retourner d’où il vint pour savoir où il va. Que le monde ait perdu son chemin peu le nieront, et il me semble avoir enfin trouvé une sorte de poteau indicateur d’une forme particulière et significative, et vu pour un moment, en pensée, la vraie carte des voyages modernes, mais si je suis ou non capable de décrire ce que j’ai vu, cette histoire le montrera ».

 

Ainsi débute le premier chapitre de la traduction française de The New Jerusalem, que l’on doit à Jeanne Fournier-Pargoire. La Nouvelle Jérusalem – c’est tout naturellement son titre français – fut publié en 1926 à la Librairie Académique Perrin et Cie, libraires-éditeurs. Il s'agit du deuxième livre de G.K. Chesterton que cet éditeur offrait à ses lecteurs puisqu’il avait déjà publié La Clairvoyance du Père Brown, dans une traduction d’Emile Commaerts.

Cette édition française comporte 308 pages et reproduit presque intégralement la version anglaise. Il y manque, en effet, la préface de l’auteur qui n’a pas été traduite. En revanche, on retrouve bien les treize chapitres ainsi que le conclusion de l’auteur :

 

– Le Chemin des cités

– Le chemin du désert

– La porte de la cité

– La philosophie du tourisme

– Les rues de la ville

– Les groupes de la ville

– L’ombre du problème

– L’autre côté du désert

– La bataille avec le dragon

– L’empire sans fin

– Le sens des croisades

– La chute de la chevalerie

– Le problème du sionisme

– Conclusion

 

Bien qu’il fut le résultat d’un voyage en Palestine, La Nouvelle Jérusalem de Chesterton ne se contente pas d’être simplement l’écho des émois d’un touriste devant ce qu’il découvre. Tout est toujours prétexte chez Chesterton à dissertation dans le sens où il entend aller et à surprendre son lecteur en le menant là où il ne s’y attend pas.

Ce moderne voyage en Terre Sainte lui offre donc l’occasion d’exalter les croisades, de s’en prendre à l’islam, au sujet duquel il se réjouit de voir qu’il a perdu ses droits sur Jérusalem – le général Allenby avait pris la Ville Sainte aux Turcs – de s’interroger sur le sort des Juifs du pays et de soutenir le sionisme qui promet « le retour au sol national », et plus encore peut-être de proposer une solution fédéraliste sur le modèle suisse.

À ce sujet, il y a dans les propos de Chesterton comme l’annonce des problèmes que traversent aujourd’hui et depuis années Israéliens et Palestiniens : « La vérité, écrit-il, est qu’un tel état de choses rend une nation juive en Palestine pratiquement impossible et nous force à chercher un compromis. Le compromis le plus sensé me fut suggéré par le Dr Weizmann, homme non seulement d’une grande intelligence, mais ardent et sympathique. Et ses paroles me faisaient envisager une solution, bien que lui-même ne l’eût probablement pas acceptée. Le Dr Weizmann suggérait, si j’ai bien compris, qu’il ne croyait pas que la Palestine peut former un territoire national comme la France, qu’il ne voyait pas pourquoi elle ne formerait pas une république de cantons comme la Suisse. Quelques cantons seraient juifs, d’autres arabes, suivant le genre de population. C’est la proposition la plus raisonnable qu’on ait faite jusqu’ici »

 

S'il soutient cette solution, son propos va plus loin, mais apparaît à la fois comme peu compréhensible et pour le moins utopique : « mais mon dessein est plus particulier. Mon idée qu’elle soit ou non celle du Dr Weizmann, implique clairement l’abandon d’une solidarité en Palestine et tolère des groupes de Juifs séparés les uns des autres par des populations diverses. Or, si cette idée était admise, elle pourrait avoir une grande extension. Il pourrait y avoir non seulement des cantons juifs en Palestine, mais es cantons juifs hors de Palestine, des colonies juives en différentes parties du monde. Elles seraient affiliées à un centre officiel, à Jérusalem, où seraient les grands quartiers généraux de la race et de la religion dispersées. »

Cette étrange et improbable proposition de l’écrivain, largement argumentée dans le reste du chapitre, repose encore selon Chesterton sur un aspect qui la rendait, même en 1920, encore plus improbable : « Une possibilité comme celle que j’ai énoncée devient impossible sans une suzeraineté générale de la Chrétienté sur les terres du Musulman et du Juif. Personnellement, je préférerais une suzeraineté générale de la Chrétienté à la suprématie particulière de l’Angleterre. Ce n’est pas par désir de restreindre le pouvoir de l’Angleterre, mais plutôt de le défendre. Je crois qu’une semblable situation diplomatique est pleine de danger pour l’Angleterre, mais c’est une question que je ne puis discuter. Mais je crois qu’il serait plus sage que la France et l’Angleterre gardassent ensemble la Syrie et la Palestine ; cela confirme la conclusion qui m’a toujours hanté, depuis que j’ai vu Jérusalem sur la colline, comme une ville fortifiée d’Angleterre ou de France, et pendant un moment, son dôme sombre me parut le templum Domini, et, sa tour, la tour de Tancrède ».

Dans sa proposition, Chesterton n’avait ne semble-t-il pas pris en compte que l’ère des nations avait sonné le glas de la chrétienté. 

 

À suivre…

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