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1 juin 2009 1 01 /06 /juin /2009 10:00

La publication dans une nouvelle édition, dite « édition définitive », chez Gallimard du Journal de Valery Larbaud nous offre l’occasion d’évoquer les liens entre ce dernier et G.K. Chesterton. Valery Larbaud a beaucoup fait pour répandre le nom de Chesterton en France. À ce titre, il est impossible de parler des liens de Chesterton avec notre pays sans signaler celui de Larbaud.
Comme nous l’avons déjà signalé, il signe la présentation du chapitre « Les paradoxes du christianisme » extrait d’Orthodoxie, dans la première traduction française qui en est réalisée pour le numéro du 1er août 1910 de la Nouvelle Revue française, traduction assurée par Paul Claudel.
Voici quelques extraits de cette présentation de Chesterton par Larbaud :

« (…) Comme la plupart des hommes qui eurent vingt-cinq ans vers 1895, Chesterton, élevé dans l’incroyance, adopta successivement toutes les doctrines de son temps : il fut tour à tour évolutionniste en philosophie, anarchiste en politique, ibsénien en morale. Cependant sa vie intellectuelle devenait plus large et plus vigoureuse, et déjà il tentait, par un chemin nouveau, la découverte de la vérité. En 1900, il fut à la fois pro-Boer et patriote, – et seul de son opinion en Angleterre. Bientôt il s’aperçut qu’il était en désaccord complet avec la pensée moderne : il l’avait devancée, et maintenant il s’écartait d’elle. L’expression littéraire de ce grand divorce fut une série d’articles, réunis sous le titre de “Heretics” (1905) dans lesquels toutes les croyances et toutes les affirmations de ceux qu’il appelle “les vagues modernes” étaient attaquées avec une violence extraordinaire. (…) On lui demanda de reconstruire. Au nom de quelle certitude raillait-il le scepticisme d’autrui ? au nom de quelle doctrine prétendait-il anéantir toutes les doctrines de son temps ? – “Orthodoxy” est la réponse de G.K. Chesterton. C’est au nom des dogmes fondamentaux de l’Église catholique qu’il attaque la pensée moderne : seule l’Église lui a proposé un système complet du monde. Il raconte donc comment il a été amené, peu à peu, et à son insu, à cette conclusion. C’est que les “hérésies” qu’il avait embrassées tout à tour, ne lui donnaient qu’une explication partielle de l’univers, et ne parvenaient pas à concilier les contradictions qu’il découvrait à chaque pas. Or, justement, les dogmes chrétiens réunissaient en un faisceau ces contradictions, et les expliquaient. Donc, ils étaient vrais. »

On notera que Valery Larbaud, comme l’immense majorité de ses contemporains des deux côtés de la Manche, pense que Chesterton est catholique, qu’il adhère aux dogmes fondamentaux de l’Église catholique. Or, la réalité est plus complexe et Paul Claudel qui à l’époque connaît Chesterton principalement par le chapitre qu’il a traduit pour la NRF est plus prudent. Dans un échange avec Larbaud, il demande clairement : « Etes-vous sûr qu’il soit catholique ? » La réponse ne lui semble vraiment pas aller de soi.
Il a doublement raison. À l’époque, Chesterton n’a pas encore franchi le pas pour rejoindre formellement l’Église catholique. Il faudra attendre les années 1920. Et dans Orthodoxie, il se réfère aux dogmes de l’Église historique, ceux sur lesquels s’accordent les principales confessions chrétiennes. Ce sera une démarche similaire que C.S. Lewis suivra lorsqu’il exposera le christianisme à la BBC puis dans son livre Mere christianity. Chesterton deviendra catholique ; Lewis restera anglican.

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